• Le hasard l'affecte à l'école navale de photographie basée à Pensacola, en Floride. Il y acquiert un bagage technique complet. Pour l'armée, il fait des portraits, des photos aériennes, des photos documentaires. En plus de la photographie, il y apprend aussi les techniques pour réaliser des publications imprimées (ex.: négatifs en demi-teinte et plaques sensibles de similigravure). Il a l'impression pour la première fois de se réaliser pleinement - il cite d'ailleurs souvent l'anecdote suivante : lors de sa première traversée de l'Atlantique, lors d'un quart vers 3h du matin, en pleine tempête, il a regardé la nuit et s'est exclamé : « Un jour je serai photographe ! »

    Cette période dans l'armée fait découvrir à Ralph Gibson le monde. De plus, pendant les escales de son bateau à New York, il fréquente les clubs de jazz et assiste à des lectures de poésie d'Allen Ginsberg, Gregory Corso ou Jack Kerouac. Il termine son service en octobre 1959, 3 mois plus tôt que prévu.

    Influencé par Sur la route de J. Kerouac, il part en auto-stop à Los Angeles et y arrive 4 jours plus tard. Il pense alors s'inscrire à l'Art Center de cette ville pour y apprendre la photo commerciale ou la photo de mode. Mais lors d'un court séjour à San Francisco chez un ami, il fait la rencontre d'étudiants du San Francisco Art Institute (« fabuleuse, la soirée l'a été sans aucun doute ») et s'y inscrit (toujours pour y poursuivre des études photo).

    En 1960, il s'installe à San Francisco dans un hotel bas de gamme, au centre du quartier de North Beach. Il suit seulement 2 semestres de cours: se sentant confirmé dans sa vocation, il croit que la meilleure façon de devenir photographe n'est pas de rester à l'école. Paul Hassel (un professeur) le recommande alors à Dorothea Lange qui cherchait un assistant pour développer ses négatifs. Cette collaboration dure 1 an et demi, et il mène son travail personnel en parallèle. Pendant cette période initiale, il travaille avec un Rolleiflex acheté lors de son service militaire. Sa première exposition a lieu à la Photographers' Roundtable (une des 1res galeries de photo dans la région de San Francisco).

    En 1961, un changement technique marquera la suite de sa carrière: il passe au petit-format 24x36, avec un Leica, outil qui lui donnait « la manière d'exprimer ce que je désirais ». Depuis, il n'a pas changé.

    Malgré tout, il se sent à l'étroit à San Francisco (cette ville « me faisait de plus en plus l'effet d'un lieu où je viendrais couler mes vieux jours »). Il décide en 1962 de retourner à Los Angeles pour se concentrer sur son aspiration initiale, le photojournalisme.

    New York,cette ville stimule son imagination, il la considère comme un paradis pour photographes. Il obtient de suite des contrats et fréquente des milieux de jeunes artistes. Au début de l'année 1967, il rencontre Robert Frank qui en fait un assistant pour son projet cinéma en cours : Me and my brother. En 1968, il fait la rencontre avec Larry Clark et Mary Ellen Mark. Sa pratique photographique change profondément : il s'éloigne du reportage photographique et exprime un rejet pour la photographie commerciale.

    Attiré par des écrivains comme Marguerite Duras ou Jorge Luis Borges, par le nouveau roman, la musique atonale ou la poésie concrète, il se met à vivre la nuit et dormir le jour. Il considère maintenant que la photographie est l'instrument de son introspection : ses clichés prennent une tournure surréaliste et il décide de les réunir dans un livre, The Somnambulist. Mais il lui faut 3 ans avant de réussir à le publier : en 1969, il rencontre plusieurs éditeurs avec une maquette terminée, mais refuse finalement les offres qu'on lui fait pour garder son autonomie éditoriale. Il crée alors sa propre maison d'édition, Lustrum Press. Cette dernière publie enfin The Somnambulist en 1970 (tirage de 3000 exemplaires). L'accueil est enthousiaste, le succès immédiat : il est invité à donner ses œuvres, à prononcer des conférences.

     

    http://www.ralphgibson.com/archive/

     


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